Nuit du 11 au 12 mars
Bombardement de réglage des 105 Viets mis en place la veille.
La 312e division finit de creuser ses tranchées d’assaut.
Bombardement au mortier sur ELIANE et ISABELLE 1.
1 prisonnier, chargé d’explosif, fait au Nord de DOMINIQUE.
Renseignements : Prévision de reconnaissance des éléments Trinh Sat de la division 316 sur l’artillerie et sur les chars pour procéder à une attaque dans la nuit du 12 au 13.
Vendredi 12 mars
La situation climatique des 12, 13 et 14 mars est peu favorable aux opérations aériennes, car la mousson gagnant le Nord du Laos donne des orages sur Diên Biên Phû, et un temps généralement lourd, avec un plafond bas, de 0 à 300 m sur la cuvette.
1er BEP : aménagement des positions.
8ème BPC : arrivée du lieutenant GARROUTEIGT sur Diên Biên Phu.
8ème BPC – pertes : 3 tués et 7 blessés.
Entre le 21 novembre 1953 et le 12 mars 1954 avant que ne s’engage la bataille la garnison de Diên Biên Phu déplore 151 tués, 88 disparus et 798 blessés ; soit un total de 1 037.
L’infanterie de la division 312 a resserré le contact autour de BÉATRICE en occupant 2 mouvements de terrain à l’Est et un autre mouvement au Nord. L’occupation est indispensable pour installer à courte distance les mortiers et ses canons sans recul. Les premières vagues d’assaut peuvent se déployer et creuser les tranchées en se retrouvant a moins de 200 m des réseaux de barbelés
Les trois assauts distincts sont prévus sur chaque mamelons selon des axes convergents.
Régiment 141 et 209 : le 141 sur les points d’appui nord-est le 209 sur le point d’appui sud-ouest
Les tranchées creusées la nuit du 11 mars sont mais elles sont rebouchées par un bulldozer, escorté par l’infanterie et des tanks. Les grenades et les mines enterrées ralentissent gravement les troupes, qui recreusent les tranchées la nuit
Renseignement à la suite d’observations aériennes du 11 mars : activités toutes rocades région Diên Biên Phu. Organisation du terrain en cours Nord et Nord-Ouest cuvette. Nouveaux alvéoles carré TJ 96. Contact 11 mars Diên Biên Phu : bataillon 16/14/Div 312 Nord BÉATRICE – Bataillon 154/209/Div 312 Est BÉATRICE. En accord avec densité DCA, organisation terrain, trafic radio SR. Cette présence permet penser secteur Nord-Est Diên Biên Phu demeure zone d’activité principale.
Renseignement : Cadres du détachement paraissant chargés action contre-artillerie et chars ISABELLE effectueront reconnaissance nuit du 12 au 13. Attaque du détachement aura lieu nuit du 13 au 14.
05 h 30
Un Privateer de la 28F bombarde à 8 km au Nord de Diên Biên Phu.
Lever du jour
V/7e RTA GABRIELLE : Une observation matinale décèle l’amorce d’un système de tranchées à l’Est, au Nord et au Sud-Ouest du PA. Ces tranchées sont comblées en partie au Sud-Est et Sud-Ouest du PA.

08 h 00
Début des parachutages de matériel.
La CAT commence les parachutages.
Livraisons médicales : matériel et équipement d’un hôpital militaire américain (tenues de combat, médicaments, Pataugas neuves).
Les affuts 12.7 sont prêts au tir.
BÉatrice est tellement sous pression qu’il faut un bataillon renforcé de 2 pelotons de chars pour permettre aux légionnaires d’aller chercher de l’eau à la Nam Youm. COGNY assiste à cette opération de dégagement. Le bulldozer est utilisé pour reboucher les tranchées préparées par la 312e Division en plaçant des mines avant de reboucher.
Sur guidage du Criquet Sierra Bravo le capitaine PAYEN, sur Bearcat, intervient au napalm sur les tranchées au nord de BÉATRICE.
Peloton de chars BLEU envoyé sur GABRIELLE pour sécuriser la récupération d’un parachutage raté au-delà du goulet à 1 km nord de GABRIELLE.
Les chars et les camions, avec une section embarquée, récupèrent du matériel directement derrière. Le restant de la Cie du BT 2 en recueil au goulet.
Le MULHOUSE en tête, les chars se portent au plus loin mais ramassage long d’obus de 105.
La Cie du BT 2 est prise à partie dès l’installation, accrochée au Goulet bloquée en terrain plat sans pouvoir se replier. Appel à l’aide de GABRIELLE et récupération en catastrophe des équipes de ramassage avec le 5/7 RTA. Les camions font demi-tour.
Recueil, chars en protection, encadrés par l’artillerie du camp (mortiers de 120 mm de Gabrielle) en action.
Décollage des chasseurs. Retour par ANNE-MARIE 3.
ROUGE a pris seul la direction de BÉATRICE. Nettoyage des abords sous la protection des casemates du PA. Plusieurs objectifs traités. Riposte Viets au mortier. Très bonne qualité d’observation et de commandement de tir Vietminh. Traitement à la mitrailleuse lourde des colline autour du PA pour permettre le ravitaillement de BÉATRICE.
Retour position fin de matinée.
Le bulletin de synthèse du renseignement se termine par : « il semble que nous soyons à quelques heures du coup de force ».
10 h 20
Bilan combats de BÉATRICE du 11 mars :
- Pertes amies : 10 blessés.
- Pertes ennemies : 18 tués, 2 prisonniers, 1 FM, 9 armes.
ISABELLE : Le 8e Choc et la Légion poussent une reconnaissance au sud de la cuvette sans rencontrer de résistance. Découverte de 800 m de tranchées creusées dans les rizières à 1 km à l’Est.
3 chars de VERT avec le 3/3RTA chargés de reboucher les tranchées découverte la veille. Les 3 chars en ligne sur les rizières asséchées ; la bonne visibilité permet de couvrir un front d’un km.
Les chars parcourent 800 m de tranchées vides. Au bout de 2 heures, retour vers ISABELLE. Le 8e Choc est en support au niveau de la piste avion.
Bombardement Viet de 75mm et mortier de 120 dans divers points de la vallée.
2 Bearcat du Saintonge et un de l’EROM 80 sont arrivés de Bach Maï pour relève ainsi que 2 autres du Languedoc.
2 Morane 500 détruits par artillerie. Destruction totale du Criquet OS E N° 844 et endommagé SB n° 796 plan fixe gauche arraché, moteur cellule touché en de nombreux endroits. Demande du GATAC NORD au GATAC LAOS de mettre en place d’urgence un Criquet après la destruction de 2 Morane.
Début des premiers tirs de DCA de 37 mm.
Les Viets s’installent au Nord-Est du PA WIÈM. Les Thaïs du peloton essaient de les déloger.
Bataillon de Nguyen HIEN et régiment 57 du lieutenant-colonel Hoang KHAI TIEN.
Dernière visite du Général Cogny passage par Béatrice et sur Dominique.
Capitaine GARANDEAU mécontent du départ de 4 officiers et de 86 tirailleurs anciens (fin de service) mais remplacés seulement par 2 sous-officiers et 40 hommes.
Depuis le début d’année 7 officiers sur 16 ont quitté le bataillon remplacés seulement par 3.
Entre le 21 novembre 1953 et le 12 mars 1954 avant que ne s’engage la bataille la garnison de Diên Biên Phu 151 tués, 88 disparus et 798 blessés soit un total de 1 037, essentiellement parmi les troupes parachutistes très sollicitées pour des sorties à longue distance, des reconnaissances aux abords de la cuvette et des embuscades. Le 1er BEP, le 5e BPVN, le 6e BPC, le 1er BPC et 8e BPC seront les plus touchés.
Officiers et sous-officiers équivalent à l’encadrement 2 bataillons.
Depuis le 20 novembre et jusqu’au 12 mars veille de la bataille les pertes s’élèvent à :
- 7 officiers 17 sous-officiers et 120 hommes ont été tués.
- 2 officiers 9 sous-officiers et 77 hommes ont disparus.
- 29 officiers 100 sous-officiers et 675 hommes ont été blessés.
- La Légion a perdu 11 officiers 32 sous-officiers et 251 hommes.
BIGEARD : Physiquement et moralement, Diên Biên Phu n’est pas au point le jour de l’attaque du 13 mars : 12 bataillons de valeur inégale dont 2 d’intervention, le tout fatigué, une casse énorme parmi les unités d’intervention… 337 paras hors de combat ; positions vitales occupées par des éléments non valables, par exemple : DOMINIQUE 2, la clé de l’affaire, tenu par un bataillon nord-africain qui s’enfuira après quelques minutes de combat ; pas ou peu de mines, pas de travaux sérieux sur bon nombre de points d’appui…qui ne sont pas reliés entre eux par des tranchées… abris insuffisants ; éléments d’intervention tenant des points d’appui face à l’ennemi ; lassitude générale qui joue sur le moral, trois ou quatre mois de présence dans la cuvette ; bataillons au-dessous de leur effectif avec souvent un seul officier par compagnie ; publicité faite autour de la forteresse… Autre Verdun… Qu’ils viennent, ils verront ! Approbation de visiteurs qualifiés politiques et militaires.
Etat de l’artillerie :
- obusiers de 105 mm : 24.
- obusiers de 155 mm : 4.
- mortiers de 120mm : 32 dont 8 en maintenance.
13 h 00
Tirs de mortiers sur BÉATRICE.
Arrivée du lieutenant Xavier MOISSINAC, journaliste rédacteur en chef de « Caravelle », dépendant du SPI (Service Presse Information), journal conçu pour informer après censure les soldats du corps expéditionnaire Il reste dormir à Diên Biên Phu pour voir comment cela se passe à l’approche de l’assaut.
Les pilotes de la CAT volent en double avec les pilotes français pour apprendre les procédures.
15 h 30
Accompagné de DE CASTRIES et de son état-major COGNY retourne à son avion qui est resté toute la journée sur la piste.
16 h 00
Les deux moteurs tournent quand une salve de 105 tombe sur l’aire de stationnement encadrant l’escorte et incendiant 2 Criquet garés à proximité.
1 Morane flambe (le OS E n° 844), touché par un tir de mortier, le SB n° 796 à le plan gauche arraché moteur et cellule touchés en nombreux endroits.
Les Bearcat décollent et mitraillent les crêtes d’où sont partis les bombardements.
Depuis le 1er février, c’est le 7e bombardement du parking. La tour et le centre de trafic aérien (base aérienne 195) ont été atteints à 8 reprises depuis février.
Chaque fois qu’un obus fait un trou dans les grilles du terrain le génie doit aller réparer sous le feu.
Après-midi
Monsieur BORDIER, gendre du vieux pirate Deo Van Long évacué de Laichau, quitte en catastrophe Diên Biên Phu par un avion pour aller se faire, soi-disant, soigner les dents à Hanoï.
Le Décret N° 52-235 du 3 mars 1952, relatif à l’ALOA précise, sans ambiguïté ni restriction, que l’ALOA est chargée de la mise en œuvre des matériels légers nécessaires à l’artillerie pour assurer l’observation et la conduite du tir.
L’Arrêté interministériel du 12 mars 1953, relatif aux modalités de transfert de l’ALOA de l’armée de l’Air à l’armée de Terre, pris en application du décret susvisé, précise que, outre leurs missions d’artillerie proprement dites, sont chargées :
- D’assurer la surveillance des zones où se déroulent des opérations actives ;
- De signaler les objectifs d’opportunité aux avions d’intervention et éventuellement de guider l’attaque de ces derniers ;
- D’éclairer et accompagner les colonnes et convois en zone d’insécurité.

Situation des approvisionnements le 12 mars :
Vivres en jours de ravitaillement : 10 jours sur 12 prévus 12.
Munitions en unités de feux :
- Infanterie : 6 UF sur prévus 7 UF
- Mortiers de 120 : 71 UF sur 2 prévus ou 10
- Artillerie : 7 UF sur prévus 7 UF
- 75 GUN pour char : 9 UF sur prévus 10 UF
Véhicules :
- 47 Jeep,
- 29 Dodge 4×4,
- 19 Dodge 6×6,
- 37 GMC,
- 26 remorques citernes à eau,
- 2 ambulances,
- 4 Bulldozers,
- 7 remorques ¼ de tonnes.
Armement – Maintenance : 10 FM, 14 PM, quelques fusils, 1 mortier de 60 mm, 1 mortier de 81 mm, 2 mitrailleuses. Cette maintenance est faible, mais estimées suffisante par FTNV.
17 h 30
un Bearcat en réparation est criblé d’éclats.
Au PC du GM 9, le téléphone grésille : c’est DE CASTRIES qui prévient le lieutenant-colonel GAUCHER, chef de corps 13e DBLE et commandant le mobile, que l’attaque est « pour demain 17 heures ». Les commissaires politiques Vietminh ont invité la population des villages à évacuer avant le samedi 13 midi.
Un Bearcat est atteint par la DCA.
14 Bearcat sont à Diên Biên Phu en relève, la décision est prise d’évacuer le maximum d’avions, 3 patrouilles Ripaton Bleu avec 4 Bearcat S et G du 2/22 et P et C du 1/22 Ripaton Rouge avec 3 Bearcat O et C du 2/22 Q du 1/22 et Red avec 4 Bearcat M – B – N – O du 1/22, soit 11 avions sur Xieng Khouang.
Il ne reste que 2 Bearcat du 1/22 Saintonge : les A et H pour assurer l’alerte du lendemain plus le S en cour de réparation et la carcasse du Tango.
Les avions de l’EROM 80 rejoignent séparément Xieng-Khouang
Au décollage demi-tour technique pour 6 Bearcat (5 du Saintonge, 1 du Languedoc) : problème de moteur (claquements et perte de puissance) dues à des problèmes de carburant de mauvaise qualité (peut être sabotage). Utilisation de l’essence 100/130 sur les terrains opérationnels produit du calaminage et la détérioration partielle des électrodes. En cas d’alerte, nécessitant un décollage rapide, des mises en route fréquentes sont effectuées au cours desquelles le régime moteur trop faible utilisé pour les contrôles moteurs favorise la production de calamine malgré les pointes de décrassage terminant les points fixes. La documentation Pratt et Withney prévoit l’utilisation aussi d’essence 115/145. Proposition faite d’approvisionner les avions en essence 115/145.
Travail toute la nuit pour vider l’essence à la pompe Japy filtrer l’essence nettoyer les moteur à la lampe torche.
Il reste le 12 au soir :
- Les O et C du 2/22.
- Les A – B – M – H – N – O – P – S du 1/22.
- Le H de l’EROM 80 en panne également.
Le Dakota ZE en provenance d’un parachutage vers la Chine se pose pour récupérer le général COGNY et son état-major en fin de visite. Il apprend au poser qu’ils sont déjà partis. Bombardements sur la piste et les parkings.
À l’arrêt du moteur, l’équipage saute dans une tranchée. Décision de départ immédiat entre deux salves. Les moteurs encore chaud, pas de point fixe demi-tour sur la piste alignement décollage. Juste au moment où les roues décollent un obus tombe devant l’appareil : baisse de pression d’huile sur un moteur.
Arrivée à altitude raisonnable, cap sur Bach Maï accompagné d’un avion sur la même route. Après un quart d’heure de vol coupure du moteur hélice en drapeau.
1 h 45 de vol sur un moteur rejoint Bach Maï.
Les renseignements obtenus par photographies aériennes, les écoutes radio, les reconnaissances offensives et les interrogatoires de prisonniers donnent l’attaque le 13 mars et les données techniques l’heure H à 17 h00 !

18 h 30
V/7e RTA GABRIELLE : Un élément VM en tenue de campagne se déplace Nord-Sud sur la côte 701 à 2 000 mètres Est de GANRIELLE.
Fin de journée
Napalmage du terrain à l’Est de l’oued (Est de GABRIELLE).
Terrain Sud remis en état.
« Messieurs, c’est pour demain 17 heures. » Le colonel DE CASTRIES, commandant le camp retranché de Diên Biên Phu, clôt le rapport du soir, le 12 mars 1954. Les officiers et les 10 871 hommes installés dans la cuvette sont confiants, certains de briser les vagues d’assaut Viets au débouché des collines…
Période du 20 novembre au 12 mars
Relevé des sorties aériennes sur Diên Biên Phu depuis le terrain de CAT BI :
De jour : 827 sorties dont
- 11F : 329
- GB 1/25 : 226
- GB 1/19 : 244
- 28F : 28
De nuit : 172 sorties dont
- 11F : 0
- GB 1/25 : 3
- GB 1/19 : 83
- 28F : 86
Total de 999 missions.